premier jeudi de décembre

Publié le par jeanphi

Premier jeudi de décembre, et il pleut comme vache qui pisse...
Réveil abrupt, sans raison, mais j’ai dû me presser pour finalement arriver à la même heure qu’habituellement au lycée. L’homme est un animal routinier.
J’ai accueilli avant l’heure mes premiers élèves qui osent désormais s’installer en classe alors qu’il leur reste encore dix bonnes minutes avant de tomber sous ma coupe. Ils arborent cet air qui rappelle furieusement celui qu’ont invariablement les gens dans les salles d’attente médicales : ils s’ennuient un peu, n’osent pas bouger et ont hâte que vienne leur tour même s’ils pressentent que ça ne va pas être une sinécure. Mais mon cours s’est bien passé, encore une fois, agréablement et constructivement. C’est une classe que j’apprécie et qui me le rend plutôt bien.

Puis, comme j’avais un creux dans mon emploi du temps, j’en ai profité pour corriger quelques copies dans notre labo tout en préparant le café de dix heures. Le labo est une salle étroite et remplie de meubles, de cartes, d’armoires et de matériel audiovisuel mobile, dans laquelle il y aussi un bureau et, depuis la rentrée, une cafetière. C’est une salle qui communique avec deux autres et se situe dans le périmètre immédiat de celles où je fais cours. C’est un endroit où j’aime travailler et attendre la suite, bien plus qu’en salle des profs. Et puis c’est aussi, en raison de l’accoustique et de la conception de l’édifice, où je peux, sans en avoir l’air (ni parfois le vouloir) épier mes collègues.
Ce matin, ainsi, alors que j’annotais des TP sur la vie quotidienne des Français durant les “années terribles, sous l’Occup’”, j’eus la surprise d’entendre une de mes collègues prononcer deux mots qui sont comme un sésame vers ma dimension préférée : chroniques martiennes.
Elle poursuivit en détaillant le contenu du livre que j’imaginais aisément : Ray Bradbury, Présences du Futur. Autant de mots dont je me délectais. Il faut vous dire que l’éditionpar Denoël chez feue la collection “Présences du futur” du Chroniques martiennes de Bradbury est à la fois le premier de la collection, ainsi que le premier livre que j’ai voulu acheter et lire à cause de ma prof de français au collège.

C’était en quatrième, ou en troisième, je ne sais plus. Il fallait écrire la suite d’un texte, et en l’occurence un extrait des Chroniques..., livre que je n’avais donc pas lu. C’était un passage décrivant le départ d’une mission vers Mars, je ne sais plus laquelle. Au sortir de là, j’eus l’irrépressible envie de savoir ce qui, dans le livre, advenait ensuite, non pour voir si j’avais eu une intuition géniale mais parce que ces lignes données en pâture à mon esprit avaient titillé mon imagination. Qu’elle ne fut pas ma déception et ma frustration en découvrant plus tard que Bradbury n’avait donné aucune suite à ce passage, mon professeur ayant choisi, la traitresse, un extrait court. Mais quel ne fut pas non plus mon plaisir en me plongeant dans cet univers absolument autre où les Martiens peuvent chanter Plaisir d’amour parce qu’ils sont télépathes !

Et puis, peu avant que ne retentisse la récréation, je suis descendu accueillir mon intervenant du jour, le responsable d'un foyer de l'Yonne, un centre où sont placés des mineurs, soit en alternative à l’incarcération, soit pour les protéger de leur famille. Nous avons bu un café et discuté avec d’autres collègues dans le labo avant d’aller retrouver, en deux temps, et deux groupes, mes cap mécaniciens et carrossiers.
J’avais déjà assisté à des interventions de ce monsieur qui partira (hélas pour nous, mais tant mieux pour lui) à la retraite l’an prochain et qui se targue (comme je l’envie) de dire qu’il ne s’est “jamais fait chier dans son travail” depuis qu’il l’exerce. Son discours d’éducateur, franc et direct passe bien en général, et cette fois-ci n’a pas failli à la coutume. Les élèves ont bu ses paroles, osant à peine l’interrompre par leurs questions ; je pouvais presque sentir les vibrations positives les traverser. Qu’en auront-ils retiré, cela je le saurais dès demain, ou lundi, on verra. Avec cet intervenant s’achevait ma participation à la semaine de la justice pour cette année.

Cet après-midi, j’ai du rangement, du travail et une sieste à faire sur fond de pluie mi-automnale, mi-hivernale.

Ce soir, je vais enfin revoir EL AURA.

Quant à demain...

Publié dans ma vie - mon oeuvre...

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D
Chroniques martiennes : C'est un sésame ultime et indéfectible. Un vrai livre pour moi aussi. De ceux qu'on oublie jamais.
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J
Stéphane > ça n'est pas improbable, et dis toi que moi non plus, mais je me rattrape sur le dos des élèves !
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S
Putain, je suis le seul à lire tout ou bien...<br /> jamais eu d'intervenants intéressants quand j'étais jeune !
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